Pour hériter la nationalité, il suffit d’avoir un des deux parents français. Donc, même si vous n’avez jamais vu la France, que vous avez toujours habité aux États-Unis par exemple et que vous ne parlez pas un mot de français, pour obtenir la nationalité française, il suffit juste d’aller à l’ambassade, de dire que votre mère est elle aussi française et voila.

Il aura tout les privilèges, droits et honneurs d’être français. Il pourra voter pour les présidentielles, décider du futur de la France, sans jamais y avoir mis les pieds. Son fils, si il demande lui aussi la nationalité française, pourra le faire également. Ainsi que le fils de sa fille, le fils du fils de son fils et ainsi de suite.

Le fils d’étranger, par contre, même né en France, devra remplir plusieurs conditions. Vivre assez longtemps en France (au moins 5 années après l’âge de 11 ans). J’en ai vécu 4.

Il y a bientôt 50 ans, mon grand-père vint en France, et mon autre grand-père aussi. L’un restera 6 ans, l’autre, 30. Deux de ses enfants sont venus le rejoindre dans les années 70. Fuyant la dictature et surtout la misère, dans l’espoir d’avoir une vie meilleure. Mon parcours est somme toute assez singulier. Né en France de parents portugais, je peux m’estimer heureux. Heureux d’être né en France oui, à Paris. C’est un coup de chance extraordinaire. Mais quand on est un enfant, on ne s’en rend pas vraiment compte. Douze ans plus tard, lorsque mon père me dit « tu vas aller au Portugal vivre avec ta grand-mère » je n’étais pas vraiment d’accord, mais les parents ont les moyens de vous persuader.

Je suis donc parti, pendant deux ans, vivre avec ma grand-mère. Ce fut sans doute la période la plus sombre de ma vie, et encore de nos jours je la paye. Lorsque ma grand-mère est décédée, j’ai du revenir en France. J’avais alors 14 ans. Je resta à Paris jusqu’à l’âge de 17 ans, âge où mes parents ont décidé de repartir au Portugal. Il fallait juste un an encore pour que je sois majeur et libre de prendre mes décisions. Pendant cette période arriva la fameuse loi Pasqua, passée en catimini de façon très rapide. Cette loi obligeait un fils d’étranger à rester 5 ans de suite après les 11 ans en France, et à faire la demande de nationalité. Vous remarquerez donc que je n’ai pas pu faire la demande de nationalité française.

Mon père n’a jamais voulu que je sois français, et a tout fait pour que je ne le sois pas. Son désir le plus profond, c’est que nous soyons tous portugais, heureux de vivre au fin fond de la campagne d’un petit pays, le plus pauvre d’Europe occidentale. Passons.

Que penser lorsque l’on comprend que le jeune joueur de foot Gonzalo Higuain est français ? Fils de parents étrangers, il est juste resté quelques mois en France avant de partir pour l’Argentine. Ses parents lui avaient demandé la nationalité, à l’époque, et Raymond Domenech était bien triste lorsque ce jeune garçon qui a vécu toute sa vie en Argentine avait décliné son invitation, préférant jouer dans la sélection albi celeste…

Et quel est mon rapport avec la nationalité portugaise, que j’ai héritée ? Aucun en particulier, si ce n’est le fait qu’on m’appelait en permanence au Portugal « le français », ce qui n’est pas étonnant lorsque votre accent rappelle tout le temps votre provenance. J’ai connu là-bas un ami, originaire d’Angola. Il était venu d’Angola enfant, et avait vécu toute sa vie au Portugal. Un beau jour, il a voulu faire un Erasmus. Un programme d’échange européen entre universitaires. Réservé aux nationaux européens. Ce qu’il n’était pas. Il n’a donc pas pu faire son Erasmus, bloqué par des problèmes administratifs en Angola qui l’ont empêché de faire la demande de nationalité portugaise…

En résumé, être national d’un pays lui permet d’avoir le droit de décider du futur de ce pays. La question que je me pose est toute simple : pourquoi les personnes qui vivent ici depuis quelques années ne pourraient pas décider de la destinée de la terre où ils vivent, travaillent, ont leur joies, leurs peines ? Qu’est ce qui fait en sorte qu’un simple lien du sang est suffisant pour avoir ce droit ?

Et pourquoi avoir des nations ? Pourquoi un belge serait dans une nation différente qu’un breton ou un basque ? On comprend vite que la formation d’une nation n’est que le fruit du hasard, de guerres, d’héritages, de mariages, plutôt que le trait d’union culturel.

L’autre jour, on me disait une phrase aussi innocente que celle-ci :

- oui, je me souviens, il était français. Ah, non, pardon, il était juif.

Personnellement, être français ne devrait pas reposer sur un papier, sur un système, sur une Loi. Ce sont simplement les personnes qui vivent ou ont vécu en France, et qui parlent français. Rien de plus, rien de moins. Exit le concept de droit du sang, de sol et tout le reste.

Exit les frontières. Exit le concept de nation, de passeports, de visa. Juste une carte d’identité mondiale, reconnaissable partout. Exit les différences entre les hommes. Il faut en finir de ses frontières, de ces clubs privés géants que l'on nomme nations.

« On ne peut pas laisser venir tout les étrangers, ils vont nous manger tout cru ».

Oui, ils le feront si on continue à vivre repliés sur soi et si on continue à exploiter leurs pays respectifs.

« On va perdre notre identité »

C’est qu’elle n’était pas assez forte pour s’imposer, et elle n’aurait eu que ce qu’elle mérite.

Comment organiser un monde sans frontières ? Pour l’instant c’est impossible. On ne peut le faire que pour les pays ayant un minimum d’affinités avec nous. Pour l’instant, contentons nous d’essayer d’abattre les frontières Européennes.

Il est inconcevable de se rendre compte que pour un même travail, vous êtes payés dix fois moins en Roumanie qu’en France. Pourquoi ? Evidemment que si je suis roumain, je serais tenté d’exercer ma profession en France, même pour cinq fois moins qu’un français : c’est toujours cinq fois plus qu’en Roumanie.

Vous croyez que ça se corrige comment ? En leur interdisant de venir, ou de faire en sorte qu’eux aussi, ils puissent avoir le même niveau salarial ?

Est-ce que moi, je vais demander la nationalité française, quand je pourrais ?

Oui. Pour le principe. Parce que je veux pouvoir avoir mon mot à dire dans ce pays qui est finalement aussi mien que le Portugal, ou plus.

Pour finir, une réflexion sur l’expression « immigré de deuxième ou troisième génération ». Il faut bien comprendre qu’un immigré de deuxième génération, ça n’existe pas. Cette expression est ridicule, surtout pour ceux qui n’ont jamais mis les pieds dans le pays d’où sont originaires leurs parents. On pourrait dire « fils d’immigrés » à la place, non ?

Mon pays, c’est celui qui me donne à manger vous diront chaque immigré.